Carrière de l’Ouest : et maintenant ?
Après la réussite de la mobilisation citoyenne contre le projet l’urbanisation de la carrière de l’Ouest, ENDEMA93 propose de faire le point et de tracer les perspectives pour les suites à donner à nos actions.
Le projet d’urbanisation
Lors de la dernière réunion publique du 29 mai 2019 à la mairie de Gagny, la Gabinienne d’Aménagement (GA) avait promis de présenter un nouveau projet à la rentrée. Début novembre, aucun document ne nous est parvenu. ENDEMA93 est convaincue que la GA, au vu des investissements réalisés dans les études, n’a pas renoncé à ses projets.
La position des élus
C’est sans aucun doute la mobilisation de la population qui a entraîné la volte-face des élus Gabiniens à propos du projet d’urbanisation de la carrière de l’Ouest (lire ici), ENDEMA93 se réjouit de cette décision, mais attend des actes.
En effet, ces mêmes élus ont voté le Plan Local d’Urbanisme (PLU) de Gagny qui a autorisé toutes les constructions actuellement en cours sur la commune. L’annulation du PLU, obtenue par notre association, a stoppé la bétonisation des carrières, mais jusqu’à quand ?
L’Etablissement Public Territorial (EPT) Grand Paris Grand Est, à la demande de la commune, a déposé un recours en appel contre l’annulation du PLU de Gagny. Cet appel, dont le jugement pouvait confirmer la décision du Tribunal administratif qui a annulé le PLU pour consommation d’espaces naturels, va à l’encontre des nouvelles positions affichées par les élus Gabiniens en faveur de la préservation des carrières. L’EPT Grand Paris Grand Est a finalement retiré son appel.
L’annulation du PLU, maintenant définitive, permet de sauvegarder les trois carrières de Gagny et de remettre en question la bétonisation l’ensemble de la commune.
ENDEMA93 attend de l’EPT Grand Paris Grand Est, qui élabore actuellement le Plan Local d’Urbanisme Intercommunal (PLUi), un projet pour le territoire en cohérence avec l’annulation du PLU. Les élus gabiniens de l’EPT doivent exiger que les trois carrières soient classées en zone naturelle afin de les préserver de toute construction et de les conserver en espaces naturels.
La position de la préfecture
Le rôle du préfet dans ce dossier est déterminant. Après avoir échoué à contraindre la société Marto à faire face à ses responsabilités en sécurisant les habitations en péril, le préfet soutient le projet de la GA qui prendra en charge le comblement de la carrière de l’Ouest contre des droits à construire.
Nous avions demandé à la préfecture une identification des habitations en danger, pour que les propriétaires soient informés du degré de risque, et la réalisation d’une étude décorrélée de la sécurisation et de l’aménagement de l’ensemble de la carrière.
La préfecture nous indique avoir communiqué aux maires des 3 communes les noms des propriétaires des habitations et terrains en aléas très forts repérés sur la carte du Plan de Prévention des Risques Naturels (voir ici la carte des aléas et ici le dossier du PPRN) et avoir demandé à l’Inspection Générale des Carrières (IGC) une mise à jour des études sur les risques en limite du site qui devrait être remise en fin d’année.
Si le préfet souhaite prendre les mesures nécessaires à la sécurisation des maisons, il a la possibilité d’engager la société Marto à vendre ses terrains et de confier à l’Etat, à la Région la sécurisation des habitations. L’activation du Fonds Barnier doit également être étudiée.
En signant l’arrêté de défrichement le 30 juin 2019, le préfet a autorisé la GA à raser la carrière de l’Ouest, moyennant une compensation. Il nous a pourtant déclaré lors d’une réunion le 3 juillet 2019 qu’avec l’annulation du PLU de Gagny, il devenait impossible de construire sur la carrière.
ENDEMA93 a déposé un recours gracieux contre l’arrêté préfectoral de défrichement (lire ici), de même que plusieurs riverains.
Le préfet a les moyens d’agir concrètement contre l’étalement de l’urbanisation et contre la consommation d’espaces. Il dispose depuis le 29 juillet 2019 d’une Instruction du gouvernement relative à l’engagement de l’Etat en faveur d’une gestion économe de l’espace (lire ici) qui lui demande d’accompagner les collectivités territoriales dans la lutte contre l’artificialisation des sols et de contribuer à l’objectif " zéro artificialisation nette" inscrit dans le plan Biodiversité 2018.
Il doit veiller à ce que les documents (PLU, PLUi) justifient réellement les développements programmés au regard des besoins comme de l’analyse de l’offre existante. Il doit faciliter la recherche de solutions favorisant la sobriété foncière, la nature en ville et la renaturation.
ENDEMA93 demande que la protection des carrières de Gagny soit inscrite dans les actions retenues en Seine-Saint-Denis.
Les actions engagées
ENDEMA93 a organisé le 11 octobre 2019 une réunion avec les riverains concernés par les aléas de risques carriers pour faire le point sur les recours gracieux déposés et échanger sur la situation. En comparant les différentes cartes des aléas et des galeries, nous nous sommes interrogés sur le degré de risque encouru par les maisons en bordure du site.
Le recours gracieux d’ENDEMA porte sur :
- l’absence de justification de l’autorisation
- la destruction d’un espace naturel
- l’absence d’étude relative au site Natura 2000
- l’absence d’étude de risque pour les habitations riveraines
- l’absence d’analyse des conséquences du défrichement.
Les recours gracieux des riverains portent sur :
- l’absence d’information par la préfecture, par la mairie; la non réalisation préalable d’un diagnostic géotechnique pour les propriétés exposées aux risques
- l’obligation faite par les arrêtés de 2013 et 2017 à M. Marto de sécuriser les abords de la carrière
- l’absence de justification du besoin de sécurisation
- l’absence de justification du défrichement et sa dangerosité pour les propriétés riveraines (glissement de terrain)
- les conséquences environnementales catastrophiques.
La discussion a porté sur l’opportunité de déposer plusieurs recours contentieux individuels ou un seul recours collectif des riverains ou un recours d’ENDEMA93.
Après avoir consulté ses conseillers juridiques, ENDEMA93 va déposer en son nom propre un recours contentieux s’appuyant, entre autres moyens, sur l’illégalité.
Les riverains qui le souhaitent peuvent déposer un recours contentieux individuel, sous réserve qu’ils démontrent leur intérêt à agir et en quoi le défrichement représente une atteinte. L’action de groupe n’étant pas reconnue dans ce cas, il n’y a pas lieu de déposer un recours collectif.
Fin octobre est intervenue la décision implicite de rejet des recours gracieux. Un collectif de riverains a déposé un recours contentieux. ENDEMA93 formera un recours contentieux dans le délai légal d’ici à fin décembre, de même que plusieurs riverains à titre individuel.
La réunion portait également sur le dépôt d’une plainte au pénal. Cette procédure est longue et incertaine et ENDEMA93 ne retient pas cette option pour le moment. Toutefois, les riverains peuvent considérer qu’ils ont intérêt à déposer plainte au pénal pour obtenir réparations des dommages qu’ils estiment avoir subi.
ENDEMA93 a rencontré le maire de Gagny, échangé avec les services de la préfecture, demandé une entrevue à Mr Capillon président du territoire Grand Paris Grand Est.
Les actions à venir
ENDEMA93 entend bien ne laisser aucun répit aux décideurs et va solliciter à nouveau le préfet, le Conseil départemental, le Conseil régional, la Métropole du Grand Paris.
Nous étudions l’activation du Fonds Barnier et enverrons un dossier aux députés européens pour l’activation de fonds européens.
Nous mesurons bien que la période pré-électorale actuelle ne facilite pas le traitement du dossier, mais il nous appartient de montrer aux candidats aux élections municipales que Gabiniens, Raincéens et Villemomblois sont contre le projet d’aménagement de la carrière de l’Ouest.
Une autre vision du développement urbain est possible et les candidats doivent s’engager, s’ils sont élus, à faire barrage à cette opération destructrice et à explorer avec les services de l’Etat toutes les alternatives à l’urbanisation de la carrière.
Un tel projet va à l’encontre de toutes les valeurs de protection de l’environnement défendues maintenant par une immense majorité de la population française. De toutes parts et de tous partis, des voix s’élèvent pour que les actes soient en accord avec les discours. Cette volonté globale s’enracine dans l’action locale, ENDEMA93 appelle tous ceux qui s’opposent à cette catastrophe annoncée à rester mobilisés et prêts à agir pour défendre ces 14 hectares de nature... Nos 14 hectares de nature.